something real

L’horloge trace vingt-trois heures dix. Et t’es là, encore une fois. Perdu dans un labyrinthe de murs blancs, de bips et de sons, d’émotions chargés et de personnels poules pas d’tête. Temps de repos inexistant. Hôpital fourmilière bon à bouffer les murs de désespoir. On t’a expulsé de la chambre sans trop de pardons. Force une idée de repos, alors qu’elle ne réalise pas que t’es là. À quel moment tu déranges quelqu’un dans le coma ? À quel moment ta mère va te dire : dégage j’veux de la tranquillité alors qu’elle n’a pas prononcé un seul mot d’puis ce jour fatidique ? Discours bouillonne en toi sans que t’en crache une seule note. Ils subissent assez tes états d’âmes lorsque tu viens, une bouteille de fort dans le nez. Presque banni de l’hôpital pour tes réactions parfois violentes. Tu sais te calmer. Les raisons sont bonnes de l’être. Alors que tu récupères ton téléphone pour le rallumer et voir autre chose que ton sale reflet dans l’écran abyssale. Notifications se succèdent. Grande soeur tenue loin de tes visites abusives. Vous y allez à votre propre rythme. Et même d’vant elle, t’as image à tenir.

Chaussures usées traitées jusqu’à l’extérieur pour cinq minutes de clope. Conversation sans fond se tient avec préposée qui fait friction contre ses bras pour se réchauffer. Alors que ton attitude gueule rienàbattre avec jeans troués et croptop hors-saison. T’as laissé ton manteau surdimensionné sur la chaise, dans sa chambre. T’iras le récupérer lorsque tu seras prêt à partir. Une fois clope morte sous ta semelle, tu retournes à l’intérieur en visant directement la cafétéria. T’as trouvé la salle de repos du personnel. Enfin, on t’a déjà permis de dormir sur leur canapé y’a deux ans. Peut-être que t’iras faire un tour pour un peu de tranquillité. Peut-être aussi qu’on t’gardera la porte fermée au nez. Luxe non garantie. Tu atteins la grande salle. Légère attitude gratuite offerte aux quelques vieux qui dévisagent. Pif curieux regarde ce qui est encore vendu à une heure aussi tardive. Cuisine probablement fermée. Restants un peu tristes, séchant dans les réchauds. Tu souffles un rire. Peut-être que tu te laisseras crever de faim.

Option sélectionne sandwich à la laitue bien trop molle; part de gâteau au glaçage tant bien que mal douteux. Bouteille d’eau et café brûlant sur plateau, tu fais face aux têtes déjà présentes. Analyse coin de solitude enviée. Puis… Regard butte tête connue. Pas connue-je-viens-trop-souvent-à-l’hôpital-visiter-ma-mère. Connue j’ai-baisé-avec-toi-et-j’en-redemande. Se tient là, café fumant devant lui et froissant une page de journal pour passer à la prochaine. Sarrau touche presque par-terre. Et tu réalises une chose: t’avais aucune idée qu’il bossait à l’hôpital. Pas le genre de sujets que vos quelques rencontres ont glissés sur table. Sourire narquois amène nouvelle couleur à ton visage plus tôt éteint. Tu t’approches, laisse tomber plateau devant lui alors que tu prends place. Yeux se verrouillent ensemble. Laissant effet de surprise couler entre vous deux. Tu fais glisser le plateau en t’permettant de croiser les bras sur la table et te pencher légèrement vers l’avant. - C’est qu’ça donne presque chaud d’te voir avec c’truc ? Pointe de l’index le vêtement blanc qu’il arbore. Attention qui déborde vers ses lèvres. Puis de nouveau, la profondeur de ses orbres. - Long time no see étiré comme une mélodie farouche.