games of power ( yejun & rhys )

Cela faisait trois mois maintenant que Rhys fréquentait les bancs de la prestigieuse Columbia University et, à peine un seul depuis que l'on pouvait le croiser régulièrement aux réunions des In Lumine. Jeune orphelin de vingt piges qui a pu s'offrir des études là-bas à la sueur de son front - mais aussi grâce aux manigances sournoises d'Earl Pickle, son bienfaiteur. Discrétion, retrait, observation, le Blackwell s'était retrouvé au mauvais endroit au... bon (ou mauvais ?) moment. Gueule d'ange que l'on a pensé égarée et qui s'est fait attirer dans un monde qu'il n'aurait jamais cru pouvoir toucher un jour, ne serait-ce même que du bout de ses doigts. Bouteilles de champagne, verres de vin, cigares aux lèvres, billets verts sur les tables... Une odeur de vieille fortune nauséabonde. De privilèges. D'opportunités. La Reine de Cœur a tout de suite gobé son histoire, trop peu intéressée par cette dernière pour en faire la vérification - bien plus concentrée sur sa beauté. Qui pouvait le nier ? Que Rhys était un joli morceau ? Intouchable. Admirable à au moins un mètre de distance. Façon statue dans un musée.

― J'ai prévu d'organiser une grande vente aux enchères pour la purge de l'année prochaine ! Je suis déjà entrain de faire la liste des New-Yorkais et New-Yorkaises que j'aimerais proposer à mes clients. s'était exclamé un vieil homme, un verre de bourbon entre les doigts. Celle que nous avons vécu il y a quelques jours était fabuleuse, avez vous entendu parler de ce qu'il s'est passé au Texas ? Ils ont rasé une ville entière ! Ca devait être... magnifique. avait rajouté une femme d'environ la cinquantaine, parée de ses plus beaux et plus gros bijoux.

Ces discours ? Déroutants la première fois qu'on peut les entendre mais, tout à fait normaux ici - à l'abris des regards indiscrets. Evidemment, tous les In Lumine ne partageaient pas des valeurs aussi morbides que celles de la NFFA mais... Être riche et caché du monde... Cela faisait faire et permettait de dire beaucoup de choses atroces. De quoi donner envie à l'acrobate de quitter son siège pour s'en griller une dans le jardin d'hiver. Et peut-être même s'y cloîtrer jusqu'à ce que le doyen de l'organisation veuille bien clore les festivités...

― Bah alors l'bourgeois, qu'est-ce que tu branles tout seul ? T'es pas avec les autres pétés d'fric ? avait-on pu entendre résonner dans la cour de la part de deux gars franchement mal sapés (même si, le Rhys de 2019 était encore bien loin d'avoir la classe du Rhys de 2024).

― Qu'est-ce que vous faites ici ? avait soupiré Rhys entre deux lattes et avec une certaine nonchalance - son éternel et légendaire air blasé de tout.

― C'est plutôt à toi qu'on devrait poser la question. Nous on a travaillé pour accéder à Columbia. On a pas attendu qu'papa et maman nous ouvrent les portes.

Papa et maman.
Blessure encore ouverte. Trop fraîche. 2016 était loin et pourtant... Y'avait toujours ce trou béant dans sa poitrine.
Si seulement ils savaient que Rhys Blackwell n'était autre qu'un acrobate de cirque un peu trop chanceux. Le trèfle. À l'image de sa couronne sur la tête.

― Et j'suis censé faire quoi ? Vivre comme un pauvre avec tout mon fric ? Mégot éclaté par terre et piétiné du talon de sa chaussure. Il s'était retourné et s'était accoudé, un sourire malicieux collé sur son visage - à la manière du chat dans Alice au Pays des Merveilles. Vivre comme vous ? La tête inclinée sur le côté, les jointures de ses mains devenues progressivement blanches. Pas d'humeur à rester diplomate, endroit parfait pour se défouler. Personne à l'horizon. Qu'il en dise une de plus pour qu'il puisse cogner le premier sans ne rien avoir à se reprocher.