Break a leg ! || Joylery

L’opération de la péricardite chronique calcifiante qui ne prenait pas la moitié du cœur d’un sexagénaire mais bien ses trois quart se conclut sur un succès et les huit heures passées à minutieusement extraire la masse de six centimètres sur cinq du patient éreinta toute l’équipe. C’était une intervention de grande envergure et la rareté de la pathologie avait fini par ravir Shelter qui, comme à son habitude, avait assisté Valery dans ses moindres faits et gestes après avoir méticuleusement étudié l’intégralité des détails du déroulement de l’extraction. La famille fut soulagée et ravie d’entendre la blonde leur annoncer la bonne nouvelle, à tel point qu’on la remercia vivement, attirant avec l’accolade de l’épouse toute la gratification que cela pouvait bien lui procurer. C’était alors avec un sentiment de satisfaction et l’air solaire qu’elle arborait dans ce genre de moment qu’elle retrouva Nicholson pour lui rapporter les dires de la famille. Dans son bureau, après avoir refermé la porte derrière elle, la blonde s’installa rapidement sur la chaise qui faisait face au quadragénaire. « Ils sont ra-vis, sa femme m’a même prise dans ses bras. Je leur ai tout expliqué: Le traitement, la convalescence et qu’il valait mieux qu’il aille en rééducation cardiaque quelques semaines avant de rentrer à la maison. Apparemment ils ont une bonne mutuelle donc ça ne posera aucun problème. Bon. » Comme éjectée par un ressort, Shelter bondit sur ses pieds avant même que le chirurgien ne puisse lui répondre. Et comme elle était entrée, elle se déplaça tout aussi rapidement jusqu’à la porte, mains posée contre la poignée. « Je vais faire les transmissions à l’équipe, je passe voir les patients d’hier et peut-être juste celui de la 13 comme il n’était pas si bien tout à l’heure, je prends ma douche et on y va ? A tout à l’heure ! » Joyce referma la porte énergiquement après être sortie, et déambula dans le service afin de s’assurer que tout était en ordre avant qu’ils ne partent pour la montagne.

Il n’était pas loin de dix-huit heures lorsque Shelter claqua la portière côté passager et qu’elle s’installa aux côtés de Valery qui l’avait attendu dans sa voiture. Elle soupira: « Voilà, désolée j’ai croisé Mathilda qui me demandait si on ne devait pas mettre des aérosols à Mme Suarez et je l’ai ausculté très vite fait, elle commence une petite pneumopathie donc j’ai mis le cocktail habituel. Shelter reprit sa respiration, attacha sa ceinture et pivota les épaules vers le quadragénaire. J’ai dit de voir avec le pneumologue de garde si ça s'empire sur le week-end. Essoufflée, elle s’affaissa sur le fauteuil en constatant que le paysage dans la vitre sur sa droite commençait à défiler. Qu’on ne me parle plus de boulot à partir de maintenant ! » Fit-elle, puis se pencha vers le plancher et y récupéra sa pochette d’ordinateur duquel elle sortit le macbook qu’elle démarra immédiatement. Quelques secondes passèrent avant qu’elle ne tourne les yeux vers Valery dont elle avait sentit le regard juge se poser sur elle. « Comme on a quatre heures de route je pensais juste terminer mon projet pour le module de santé publique, j’ai eu plein d’idées. » Ajouta la jeune femme qui avait ouvert les dizaines de pages déjà rédigées pour pouvoir continuer à pianoter sur son clavier et coucher le millier d’idées qui lui avaient remplis les méninges.
Elle avait attendu ce week-end comme on attendait Noël et bien que l’idée de passer les deux prochains jours avec Valery l’avait quelque peu fait réfléchir avant de dire oui, l’idée de descendre les pistes de ski pour la première fois avait fini par la convaincre. Il lui suffisait également de penser au tapis de neige qu’ils avaient peu fréquemment à New-York pour attiser son âme d’enfant et l’envie d’en profiter. Elle n’avait pas connu les vacances à la montagne et ne pouvait se vanter d’avoir parcouru une grande partie des Etats-Unis. Ses parents, bien trop pris par leur travail et leur quatre enfants, n’avaient jamais trouvé de réelles occasions pour les embarquer aux quatre coins du pays. Ils n’en étaient pas moins malheureux mais cette culture manquante du voyage était une partie que la seule fille Shelter regrettait.