Hit the dancefloor (Joyce&Lizzie)

En retard. Rendez vous fixé qu'il ne pourra honorer à l'heure. La ponctualité qui n'a jamais été son fort. Devant le miroir de la salle de bain, il tente de dompter sa chevelure, pas assez docile pour qu'il puisse en faire ce qu'il veut. Tant pis. Ça fait parti de son charme dans un sens. Terminant son service auprès de la jolie Maya, il passe le relai à cet autre, saluant à peine la gamine ingrate en quittant le domicile. Emmerdeuse de première, un job qui n'est pas celui dont il aurait rêvé dans l'fond mais tellement bien payé qu'il peut bien se coltiner la capricieuse gosse de riche quelques mois. Puis il a une vengeance à tenir... D'un pas vif, il se traîne jusqu'à l'arrêt de métro le plus proche avant de se mêler à la foule de concitoyens, le sourire aux lèvres. Une soirée qui promet d'être fantasque. Quelques minutes seulement le sépare du point de rendez vous, un petit bar non loin de cette boîte de nuit en vogue à laquelle ils ont l'habitude de se rendre. Arriver avant minuit est exclu. Il se faufile pour ne pas louper l'arrêt et parvient non sans mal à quitter la rame.

Il pousse la porte de l'établissement. Les deux silhouettes féminines sont déjà sur place. Il les reconnaît au loin tandis qu'un geste de la main dans leurs direction et un air desolé sur le visage appuie ses mots. j'suis à la bourre. rien de si surprenant dans le fond. Quelques minutes seulement. Assez pour s'excuser. Il s'approche un peu plus et embrasse chacune d'elle sur la joue avant d'ajouter :  vous avez déjà commandé ? qu'il s'enquiert voyant qu'aucune boisson ne se pavane devant elle.  cette soirée va me faire du bien. Ça va vous ? le sourire jusqu'aux oreilles. Ça fait longtemps qu'ils ne se sont plus retrouvés ainsi. S'ils se voyaient autrefois de façon quasi journalière, les vies tumultueuses de chacun empêchent aujourd'hui ces réunions et les rendent moins fréquentent. Surtout Joyce d'ailleurs puisque Lizzie fait parti de son quotidien. Elle qui l'a accueilli avec sa douceur et sa gentillesse, ne voulant pas l'voir finir SDF sur un bord de trottoir.  j'vais me prendre une bière. qu'il dit, un signe en direction de la serveuse pour passer commande. Boisson de prédilection. L'gamin qui tient pas très bien l'alcool fort. Ceci dit, il a l'mérite d'être aussi sympathique ivre que sobre.

Lizzie avait mis sa plus belle robe. Ses plus beaux talons. Elle avait passé du temps à s'apprêter, parce qu’elle avait attendu cette soirée avec grande impatience. Un samedi soir en boite de nuit avec Joyce et Mael, c’était synonyme d’un pur moment de joie qu’elle n’aurait loupé pour rien au monde, après tout. Alors, pour l’occasion, et un peu comme si cela allait faire honneur à ses amis, elle avait fait de son mieux pour se faire la plus jolie possible. Et puis qui sait ? Son futur prince charmant était peut-être aussi là-bas, lui aussi. Une rencontre en boîte, c’est jamais le début d’une belle histoire, lui aurait dit son cher frère. Mais Lizzie n’était pas d’accord. Pour elle, le début d’une belle histoire pourrait même se passer au fin fond des toilettes d'une gare, si la personne rencontrée était une belle personne.

Enfin, ce n’était pas non plus comme si elle attendait vraiment à ce que ça arrive. C’était pour ses amis, que la perspective de cette soirée l'enchanta. Mais elle était fleur bleue, Lizzie. Et une grande consommatrice d’histoires à l’eau de rose. Alors forcément, l’idée était toujours là, dans un coin de sa tête, sans trop qu’elle n’arrive à la contrôler. C’était peut-être pour ça, d’ailleurs, qu’elle réussissait toujours à s'enticher du premier venu - souvent un crétin. Quoi qu’il en était, elle comptait bien s’amuser ce soir. Parce que dès lundi, commençait le jour de l’inventaire à sa boutique, et la seule pensée de devoir compter des milliers de bonbons un à un lui donnait des sueurs froides. Danser et boire pour oublier sonnaient dès lors comme la plus douce des salvations.

C’était d’ores et déjà accompagnée de Joyce, sa meilleure amie depuis le lycée, que Lizzie se trouvait. Mael n’était pas encore arrivé, mais honnêtement, ni Joyce ni elle n’étaient vraiment surprises. La ponctualité n’avait jamais été en bon termes avec le jeune homme. Et lorsque la demoiselle aperçut enfin son colocataire arriver au loin, elle leva aussitôt ses deux bras aussi haut qu’elle le pouvait pour le saluer avec enthousiasme, sourire éclatant aux lèvres. « Heeyyyyy troisième mousquetaaaaire ! » Elle s’exclama dans un rire enfantin alors qu’il s’approchait d’elles. « t’as vu ça, il s’améliore, il arrive et on n'est même pas encore bourrées ! » elle lance ensuite à Joyce d’une voix malicieuse, ne résistant pas à l’idée de le taquiner un peu sur son léger retard. Les demoiselles étaient, en effet, loin d’être encore éméchées étant donné qu'elles venaient à peine de commander.

« Oh, la super forme, oui ! » clama Lizzie d’une voix toujours autant remplie d’entrain quand Mael leur demanda comment elles allaient. Comment ne pourrait-elle ne pas aller, en même temps ? Elle ne tenait littéralement pas en place, comme si l’euphorie qui remplissait son corps de dopamine était en pleine surchauffe. « ça faisait des lustres qu’on avait pas été tous les trois ! J’en pouvais plus d’attendre que ce soir arrive ! » riait l’Anglaise, alors qu’elle entoura chacun de ses amis d’un de ses petits bras avant de les rapprocher d’elle, comme pour les gratifier d’un câlin groupé.

Il était si rare pour la blonde de sortir que la soirée qui avait été proposée par Mael et Lizzie sonnait presque comme un remède au stress et à la fatigue accumulée de ces derniers jours, voire semaines. Comme elle aimait le faire, Shelter s’était longuement préparée, avait passé une tenue qui agrémentait davantage son armoire que son corps et avait fini par coller des faux-cils sur ses vrais qui commençaient d’ores et déjà à l’ennuyer. C’est qu’elle n’avait pas l’habitude et comme ces soirées-là étaient faites pour casser les habitudes, la longueur de ses cils pouvaient bien déroger aux règles de base. Ca lui conférait un air de poupée qu’elle trainait presque déjà avec la couleur diaphane de son épiderme souvent maltraité d’eczéma.

Elle retrouva d’abord Lizzie dans la boîte préconisée par leur ami commun et sans grande surprise, Mael était en retard mais ce n’était pas un problème puisque les discussions entre les deux jeunes femmes étaient faciles, d’une légèreté qui faisait du bien à l’âme et au moral. On parla du magasin dans lequel Liz avait trouvé sa robe, du nom de la couleur de son vernis et l’aspect diamétralement opposé de la conversation avec tout ce que la décolorée pouvait côtoyer au quotidien lui fit un bien fou, comme de nouveau oxygénée par la réalité de la vie.

Les yeux noirs de Joyce relevèrent vers la porte au même moment où Mael la poussa et elle s’exclama « Ah, il est là ! » avant de faire quelques pas tandis que lui même s’approchait. « Incroyable ! » Fit-elle, en réponse à son amie qui tentait une moquerie. « Et toi, comment tu vas ? » S’enquit Joyce en frôlant perceptiblement le bras d’Atwood avant que les bras minuscules et maigrelets de Lizzie ne les obligent à se câliner mutuellement. Moins démonstrative, Shelter tapota le dos de chacun de ses amis avant de retrouver sa liberté. « C’est vrai et désolée, c’est un peu de ma faute si on ne se voit pas beaucoup. Vous savez quoi ? J’ai bien cru, en plus, que j’allais devoir rester pour la garde de ce soir. Mon collègue qui se pointe un quart d’heure après la relève, j’ai failli criser. J’étais déjà là en train de me demander ce que j’allais bien pouvoir faire pour me faire pardonner !; Prend quelque chose Mael, on a déjà commandé avec Liz. »