Chapitre 1, survivre à l'apocalypse (sixtine)

Ses yeux se dessillent. Souvenirs de la veille qui le frappe de plein fouet, à moins que ce ne soit les mains de sa bien aimé qui le secoue fiévreusement puisque l'horloge du salon affiche 7h. La douleur qui revient. Blessure à la jambe causé par une altercation de la veille, mauvais endroit, mauvais moment. C'est toujours ainsi de toutes façons. Alors qu'il tenait seulement à vérifier que sa femme était en sécurité - comme chaque année, même depuis la séparation- il s'est fourré dans une embuscade. Trois mecs. Moins costauds que lui mais avec le privilège du nombre. Pas tout à fait fair play non plus, voyant ses deux potes au sol, le dernier a cru bon de lui planter un couteau dans la cuisse. Crevard. Pas d'autres solutions que de trouver refuge chez elle, même si elle avait promis de ne plus jamais lui adresser la parole. Ce chien qui pouvait crever dans un égout, tout plein de jolies attentions à son égard. Il avait du se montrer convaincant pour qu'elle accepte d'ouvrir sa porte. Argument de taille : si je me fait empalé sur ta boîte aux lettres, tu devras me voir tous les matins en sortant de chez toi. Là, c'est seulement pour une nuit.

Le teint pâle, le con a perdu un peu de sang dans cette affaire sordide. Rien dont il ne pourra se remettre mais ça risque de laisser une jolie cicatrice sur son corps. Une de plus. Pas obligé de me secouer comme un prunier, je suis réveillé. une main qu'il passe sur son visage, le corps totalement endolori. Elle qui a refusé qu'il dorme ailleurs que sur le canapé du salon. Dire que ce pieux dans la chambre il y a pourtant passer de nombreuses nuits, certaines douces, d'autres plus torrides. Une main qu'il passe dans ses cheveux. Il avait pourtant d'autres projets pour la veille mais avec sa blessure, il n'aurait pas pu le mener à bien. quoi ? Laisse moi deux minutes. qu'il ajoute, voyant Sixtine s'impatienter. Ses mimiques, ses gestes et ces regards qu'il connaît par coeur. Et celui qu'elle est en train de lui servir ne présage rien de bon. Pourtant hier soir, il y a bien eu des moments où on aurait pu penser qu'ils s'étaient retrouvés.

-- LA VEILLE

Les regards qui se croisent. Le sourire parfait de la blonde qui vient le faire frissonner. Il ne l'a jamais oublié. Il ne l'oubliera jamais de toutes manières. Comment cela serait ce possible, il lui suffit de la regarder pour comprendre qu'il n'est qu'un sale con pour avoir tout fait foiré dans les règles de l'art. tu penses à moi parfois ? un silence. Une hésitation. Du genre qui en dit bien plus long que n'importe quelle phrase.

Est-ce que Sixtine avait fermé l'œil de la nuit ? Non, évidemment que non. À chaque fois que la Purge pouvait se passer, la blonde se terrait chez elle et priait le bon Dieu pour que les barges du coin n'aient pas soudainement développé des compétences en hack pour déverrouiller sa porte d'entrée. Les systèmes que son père vendait étaient très efficaces mais, plus les années pouvaient passer et plus les journaux et les infos à la télé faisaient remonter des cas assez exceptionnels de foyers sécurisés déjoués. Est-ce qu'elle avait des ennemis ? À priori, en dehors de cette grognasse de pouffe de *bip* avec qui Oscar l'avait trompé y'a de ça quatre ans maintenant : non. Toutefois, elle portait de nouveau le nom Ryder... même si elle n'était pas officiellement divorcée du Donovan (à son plus grand malheur) alors, sûrement qu'elle devait en avoir pas mal et qu'elle ne connaissait même pas personnellement de surcroît. Qui donc fallait il détester d'autre que les gens responsables des barrières qui vous pouvaient vous séparer de vos victimes ?  

― J'ai été très claire hier Oscar. s'était-elle exclamée après l'avoir secoué façon tremblement de terre une fois les sirènes de la Purge retenties. Je t'ai laissé une nuit entière et c'était déjà trop. avait-elle ajouté en lui balançant un coussin en pleine poire pour qu'il se dépêche de foutre le camp de leur son domicile.

Elle était encore emmitouflée dans sa couverture qu'elle n'avait pas eu la foi de quitter. New York au mois de décembre, ça ne déconnait pas. Son sapin était fait depuis des semaines déjà et, ses fringues d'été avaient été encartonnés depuis septembre.
Ouais, Sixtine était une meuf organisée, le genre qui n'aime pas quand ses affaires ne sont pas à la bonne place. Et Oscar ? Sur son canapé ? Il y faisait tâche.

-- LA VEILLE
Elle n'en revenait pas d'avoir accepté sa présence chez elle ni qu'il ait eu le culot de penser à son domicile pour s'y réfugier. Là, installée sur un fauteuil à environ deux mètres de distance du concerné, ses yeux s'étaient perdus sur le faux feu de sa cheminée - ou du moins, jusqu'à ce qu'il ait brisé le silence qui s'était drapé autour d'eux.
Le menton relevé, elle l'avait examiné quelques instants. Sa blessure à la cuisse ? Au fond d'elle, elle se demandait si il n'avait pas trop mal. Comment. Qui. Pourquoi.
À l'extérieur ? Mine de s'en foutre complètement - à condition qu'il ne tâche pas son tapis bien entendu.

― Comment tu veux que je ne pense pas à toi ? qu'elle lui avait répondu alors que les flammes se reflétaient dans ses yeux. Ca fait littéralement quatre ans que j'attends ta signature sur les papiers du divorce. Coup de massue.

il ne sait plus vraiment à quelle heure il a pu s'endormir avec cette histoire. Les deux anciens amants qui sont restés une partie de la soirée côte à côte. Juste parce qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver lors de cette nuit là. Il aurait définitivement mérité une ou deux heures de sommeil supplémentaires. Oppressante, il reçoit un oreiller en pleine tête, ses réflexes trop absents pour parvenir à l'arrêter à temps. Ces mots qui glissent sur lui comme de l'eau. L'ami est persuadé qu'il peut lire entre les lignes et que la jolie Sixtine est encore follement amoureuse de lui. Il a bien l'intention de continuer à la persécuter jusqu'à ce qu'elle finisse par le pardonner de toutes manières. Le trait qu'il n'est pas prêt de tirer. Elle le repousse pourtant, vivement et avec une colère qui en aurait désarmé plus d'un mais ce crétin considère que tant que la haine est présente, il a une chance de la reconquérir. Si par malheur, un jour elle devient indifférente, alors il signera ces fameux papiers qu'elle a évoqué la veille.

Il se redresse légèrement. Les pieds qu'il vient poser au sol. un café peut être ? qu'il demande, moue enfantine et endormie sur le visage. Lui qui est déjà en train de se demander comment il va se rendre à l'hôpital dans état. Un taxi qui semble être l'idéal, si on oublie l'attente qu'il va subir derrière avec tous les épanchements de sang qui ont eu lieu. Manquerait plus qu'il perde sa jambe tiens.  s'il te plaît. qu'il ajoute, ses mains qui se joignent en signe de supplication.  apres je m'en vais, c'est promis. large sourire sur le visage, celui auquel elle était incapable de résister lorsqu'ils étaient encore en couple.

-- LA VEILLE

Il hausse les épaules. Ascenseur émotionnel. Elle pense à lui seulement à cause de ses papiers ? Il n'y croit pas une seconde. Si vraiment elle avait voulu l'obliger à signer, il existe des recours pour ça. Si elle accepté de se trouver encore son épouse, c'est qu'elle le veut bien. moi je pense souvent à toi. tout le temps en fait. Separation qu'il ne veut pas admettre. Presque trentenaire qui ne veut pas faire son deuil, scotché dans la phase de déni. merci de pas m'avoir laissé crever dans la rue. qu'il ajouté, son regard qui vient fondre dans le sien. )

Sixtine aurait pu refuser à Oscar l'accès à son appartement. Elle aurait pu l'envoyer péter une bonne fois pour toute. Il aurait pu y passer cette nuit et ses problèmes se seraient envolés dans la foulée. Mais non. Non parce que... le Donovan ? Elle l'avait dans la peau Sixtine, et depuis bien trop longtemps pour pouvoir faire une telle chose. Elle ne se le serait d'ailleurs jamais pardonnée. Rien que la blessure dans sa cuisse... Suffisante pour lui faire accélérer son palpitant. Hier soir ? Un bond dans le temps. Ceux qui réconfortent et qui font mal à la fois. Une amertume qui donne envie de pleurer. Parce que putain, pourquoi les choses ont-elles dérapé à ce point ? Pourquoi Six ? Pourquoi Scar ? Pourquoi eux ?

― T'es un emmerdeur Donovan. s'était-elle exclamée avant de lui envoyer un second oreiller dessus. Il savait très bien. Trop bien. Comment la faire plier en deux temps trois mouvements. Elle s'était endurcie la Ryder hein. Mais elle n'était pas non plus tombée amoureuse de lui pour rien. Et sa sale tronche de charmeur ? Bon sang qu'il lui donnait envie de fondre sur place. Enfoiré à la belle gueule, pouvait pas être laid histoire de lui faciliter la tâche ?!

— Tu sais où s'trouvent les dosettes. J'vais prendre une douche. avait-elle finalement soupiré avant de tourner les talons. Trop gentille pour pouvoir le lui refuser. Trop gentille tout court.

Et l'eau qu'elle avait laissé couler sur sa peau ? Brûlante et, en abondance. Pour cacher ses larmes. Pour détendre ses muscles. Pour se réconforter. 4 longues années. Sans chaleur humaine. Sans qui que ce soit pour la prendre dans ses bras, à l'exception de Jinx bien entendu. C'était scientifique de toute façon. Que les longues douches sont réservées aux personnes en manque de contact. Parce que le corps humain, il en a besoin. Il crèverait pour un peu d'amour. Un brin d'affection. Une poussière d'attention. Sixtine ? Elle en claquerait sur place de pouvoir revenir dans le temps. À se remémorer les moments qu'ils ont pu partager. Sur le canapé. Le fauteuil dans lequel elle s'était assise la veille. Leur lit qu'elle avait bazardé pour s'en acheter carrément un autre. La douche. Partout. Son appartement c'était elle. C'était lui. C'était eux. Elle n'en est jamais partie.

— Tu es toujours là ? avait-elle finalement déclaré après avoir quitté la salle de bain, enroulée dans une simple serviette. Pas comme s'il ne l'avait jamais vu ainsi. Pas comme si elle était pudique. Pas comme si ça la gênait quoi qu'il en soit.

-- LA VEILLE
Sixtine, elle n'a jamais eu la force d'obtenir sa signature sur les papiers du divorce. Beaucoup de bruit et d'agacement de sa part pour prouver qu'elle s'en moque. Pour un truc qui marquerait officiellement la fin de tout. Envieuse et terrorisée à la fois. À se demander comment ils avaient pu en arriver là. Pourquoi il ne voulait pas la libérer. Ce qu'elle attendait pour tirer un trait. Parce qu'elle aurait pu faire l'imbuvable. Elle aurait pu le harceler pour qu'il pose son satané coup de stylo. Mais, Six ? Elle n'a rien fait. Elle n'a rien forcé. Elle... s'est laissée porter. Depuis quatre ans. Elle attend. Elle patiente. Elle se laisse dévorer par ce qui n'a pas l'air de vouloir arriver.

― T'as perdu ce droit depuis longtemps. avait-elle marmonné d'une petite voix avant de s'enfoncer un peu plus dans son siège, visage tourné vers lui. Ça aurait été contre mes valeurs de te laisser dehors. qu'elle avait ajouté, incapable de soutenir son regard. En l'occurrence, c'était le code d'honneur des Pinks qu'elle trahissait ce soir. Avec un Godfather chez elle.
Mais par pitié. Pas ces yeux là. Qu'est-ce que tu traînais dans Manhattan au juste ? Aux dernières nouvelles, t'es installé à Brooklyn, non ? Information qu'elle tenait de Jinx bien entendu. Mais de Paris aussi.

Soirée qui n'avait ressemblé à rien à ce qu'il avait envisagé. Connerie de purge, celle qui pourtant pourra un jour il l'espère, le sauver de ses démons et lui permettre d'accomplir sa vengeance. La mort d'Thomas qui a impacté trop de choses dans son existence, sa relation avec Sixtine qui s'est vu battre de l'aile un peu plus vivement après son départ même s'il ne l'admettra jamais. Ce con qui a laissé un vide immense.  c'est aussi pour ça que tu m'aimes. qu'il dit, sur de lui. Arrogance qui file par tous les pores de sa peau. Lui qui ne se pardonnera jamais de l'avoir perdue. Ignorant totalement sa remarque, elle le laisse dans sa merde avec sa blessure et file en direction de la douche. Sourire qu'il affiche en se tournant pour la regarder s'éloigner. Bordel ce qu'elle peut être belle, sa silhouette qui se déhanche à chaque pas comme une danseuse. Galère de se déplacer dans son état. Il se traine lamentablement jusqu'à la cuisine, dosettes qu'il trouve à l'endroit habituel. Comme si tout allait bien, comme si l'espace qu'une seconde, tout était redevenu comme avant. Il sait que non. Que ce n'est pas le cas et pourtant, la nostalgie vient serrer son myocarde.

L'eau coule dans la tasse après le café. Il ferme les yeux une seconde, souvenir qui lui revient en pleine face quand il l'imagine la mine à peine réveillée, venir déposer un baiser sur ses lèvres. Rêveries dans lesquelles il se perd et il n'entend pas du tout la question de Sixtine tandis qu'elle sort en serviette. D'abord surpris par son accoutrement, il la regarde la langue pendante. Pauvre fou. Comment avait il pu poser ses adieux à ce corps si parfait. Son regard se teint de noirceur. j'avais oublié à quel point tu es jolie. Pas vrai. Il y repense chaque jour quand il scrolle sur son compte Instagram à l'affut d'une nouvelle photo. Dernière lubie en date : se faire passer pour un de ses dates pour réussir à l'approcher. Quel crétin. Il fait tout à l'envers. La tasse finit même par déborder. merde. Il éteint rapidement l'affaire mais c'est un peu tard.... Les dégâts sont déjà causés. Un peu comme leurs relations en fait, belle allégorie tiens.

-- LA VEILLE

Il tente de s'étirer, la douleur qui l'étreint. Quel con. Il aurait du être plus vif. Plus vigilant. Oscar qui n'est pas du tout à l'abris qu'un jour où l'autre un de ses plans le mène jusqu'à une mort certaine. Après tout, il l'a déjà frôlé plusieurs fois et ce soir ne fait pas exception. T'aurais laissé entrer n'importe qui ? qu'il dit en fronçant les sourcils, pas parce que ça le dérange qu'elle est le cœur sur la main, mais plutôt parce que ça l'inquiète de se dire qu'elle pourrait se mettre en danger pour un inconnu : lui ok mais les autres, c'est non, on ne sait pas ce qu'ils pourraient lui faire et il est bien placé pour le savoir. Lui qui a assisté à des trucs interdits au moins de 18ans. j'étais dans le coin Oui madame, comme par hasard, il trainait par là. Il sait bien qu'elle verra clair dans son jeu alors il reprend : j'voulais être certain que tu sois une sécurité. il lève les yeux vers le plafond et grimace : t'as toujours pas repeint le plafond. qu'il dit dans un sourire, Une sombre histoire de crêpe qui avait terminé son ascension tout en haut pour ne redescendre que quelques secondes plus tard, laissant des traces d'huiles indélébiles.

Est-ce que Sixtine aime toujours Oscar ? Autant qu'elle peut être en colère contre lui. Le brun est son premier amour et, une personne qu'elle connait depuis qu'elle est toute petite.
Ils en ont vécu des choses ensemble. Ils en ont traversé des merdes à deux. Elle et son père qui se noie dans son métier, lui et la perte de Thomas à cause d'une purge. Elle et son envie de vivre sans qu'on ne lui dise comment, lui et sa façon bien précise de faire les choses. Ils se complétaient sincèrement.
Elle apportait un semblant de stabilité. Il apportait de la spontanéité. Différents comme les pièces d'un puzzle, mais à deux... Un tableau.

― C'est probablement la dernière raison sur ma liste. s'était-elle empressée de lui répondre en roulant des yeux. Est-ce qu'elle n'avait pas nié ? Tout à fait et... elle ne s'en était rendue compte qu'une fois cloîtrée dans sa salle de bain. Pas foutue de mentir ou d'esquiver le sujet. Peut-être pour ça d'ailleurs qu'elle l'avait fuit pendant toutes ces années... Pour s'éviter de se faire avoir aussi facilement.

— J'm'en étais doutée y'a bien longtemps, t'inquiètes pas pour ça. avait-elle ensuite répondue après être sortie, chevelure encore humide et à se chercher de quoi s'habiller dans un placard du couloir pour pouvoir affronter sereinement le froid New Yorkais. Putain mon carrelage. Tu nettoies. qu'elle s'était toutefois exclamé après l'avoir entendu jurer et s'être penchée pour voir sa bêtise.

Ouais, y'avait des choses qui... n'avaient pas changé. L'obsession de Sixtine avec la propreté ? Ça s'était même empiré après qu'elle ait trouvé un long cheveux brun dans ses draps. Pas question que son foyer soit sale, poussiéreux ou mal rangé. De quoi la faire cauchemarder. L'horreur aurait été des traces de maquillage sur ses fringues. Ou son oreiller. Là... Elle en aurait pleuré jusqu'à s'en assécher les yeux.

— Va falloir que j'aille à l'agence. Dépêches toi d'prendre ton café que j'puisse fermer. avait-elle finalement déclaré, pull qu'elle avait enfilé sous son nez après avoir agrafé son soutien-gorge à moitié planquée derrière la porte d'où ne se trouvaient plus que ses habits depuis 4 ans maintenant.

Elle entendait déjà le téléphone de son bureau sonner en boucle. Des gens en larmes à gérer. Des gens désespérés à cause des portes défoncées et des systèmes de sécurité qui n'ont pas fonctionné correctement... Lendemains qu'elle déteste au plus haut point.

-- LA VEILLE
― Parce que tu penses valoir mieux que n'importe qui ? avait-elle tranché d'une voix glaciale et dont elle ne se serait jamais pensée capable de prendre.

En vérité... non. Elle n'aurait pas accepté n'importe qui chez elle. Encore moins des inconnus... Cependant, si un ou une voisine lui demandait l'asile... Sixtine se voyait mal refuser et ce, aussi dangereux cela pouvait-il être de désactiver son système de sécurité. Même dix secondes.

— Tu t'es mis en danger pour t'assurer que je ne l'étais pas moi même ? s'était-elle néanmoins exclamée, une mine surprise placardée sur son visage. Elle ne savait pas quoi choisir entre le traîter d'idiot ou de fou. Les deux. Il était les deux.

— Tu sais pourtant très bien que l'appartement est sous haute surveillance. Mon père y a installé son meilleur dispositif avant qu'on emménage. Sa porte ? Blindée. Ses fenêtres ? Pare-balles. Des caméras de partout et des stores métalliques qui ne peuvent être relevés qu'avec une télécommande...
La seule façon pour les gens de s'infiltrer ici en temps de Purge ? Qu'elle ouvre la porte toute seule ou qu'on hack le système. Mais là encore... Les logiciels étaient protégés et se renouvelaient en boucle. Elle vivait littéralement dans un coffre fort. Comme un diamant. Peut-être même mieux que Jinx alors que sa tour coûtait probablement le quadruple. Papa sui protège sa seule fille ne fait pas les choses à moitié.

— C'était à toi d'le faire. Moi j'ai peur de monter sur l'escabeau ou sur une chaise. avait-elle commenté à propos de cette unique trace sur son plafond qu'elle avait décidé d'ignorer. Comme si la repeindre allait faire disparaitre le souvenir avec. Cette soirée où ils avaient mangé comme des ours et où ils en avaient foutu partout... Pour finir par jouer avec la chantilly et le nutella... De quoi la faire brièvement rougir.

— Je vais essayer de dormir un peu. Si t'as besoin d'un truc... Tu sais où m'trouver. Gorge raclée pour finalement se lever et s'éclipser dans ce qui était autrefois leur chambre à tous les deux.

Même quand elle dit adieu à sa dignité et qu'elle est ivre morte, le Donovan la trouve à son goût. Belle. Il faudrait avoir de la merde dans les yeux pour considérer qu'elle ne l'est pas en même temps. Pour cette raison qu'il a du faire comprendre à quelques types qu'elle n'était pas sur le marché -dans son dos bien sur, sinon elle l'aurait éborgné-.  c'est bon j'nettoie. qu'il lâche en râlant, l'éponge à la main qu'il vient glisser maladroitement sur le sol, aggravant légèrement son cas. D'toutes façons, c'est pas la peine qu'il se fasse trop chier, elle repassera derrière lui. Coup d'œil rapides dans sa direction qui ne l'aide pas à mener à bien sa tâche, bout de peau sensuels qu'il aperçoit. Quoi, si elle ne voulait pas qu'il se rince l'œil, elle aurait du fermer la porte non ? Elle revient le presser avec son histoire de café, le boulot qui l'attend. Lui c'est probablement mort pour aujourd'hui vu l'état de sa jambe. Il hoche la tête et vient avaler le breuvage d'une traite. tu pourrais m'déposer à l'hôpital ? oui, il a osé, abus total de sa part et il est prêt à se confronter à un refus mais si ça peut lui faire économiser le prix d'un taxi -qui va mettre une heure à arriver-, ça l'arrangerait. Puis on va pas se cacher que c'est aussi parce qu'il la verrait un peu plus longtemps. Lui qui agit comme s'ils ne s'étaient jamais séparés.

-- LA VEILLE

 pour toi oui. qu'il dit, la voix teintée d'arrogance, flegme qui le caractérise.  et laisse pas des inconnus rentrer chez toi putain. elle pourrait très bien se faire tuer, trop gentille ou naïve pour comprendre la subtilité du piège. Pas assez pour laisser n'importe qui passer sa porte en cette nuit de purge, il l'espère vivement. Oui, il avait pris le risque d'sortir pour vérifier qu'elle était bien chez elle et en sécurité, il le fait d'ailleurs tous les ans mais il se garde bien de lui confier cette information pour éviter la crise de nerfs.  j'voulais être sûr que t'étais chez toi c'est tout. qu'il répond, impassible, comme si c'était normal de faire ce genre de truc avec la femme qu'on a trompé et qu'on ne voit plus depuis maintenant quatre longues années.

Souvenir évoqué sur lequel elle ne rebondit pas vraiment. Pas assez à son goût en tout cas, parce que la soirée qui avait suivi était magique. Tentative ratée de l'amadouer. Il hausse les épaules, il viendrait quand elle veut pour repeindre ce plafond, d'toutes façon, il a beau faire genre il est détaché et tout, il rappliquerait en une seconde si elle le sifflait. Pathétique. oh d'accord. Un peu déçu qu'elle ne passe pas plus de temps avec lui.  j'suppose que j'prend l'canap. Propre comme jamais, il va veiller à essayer de ne pas mettre de sang dessus, parce que ce crétin a quand même réussi a bien l'amocher.

Il y a des choses qui n'avaient définitivement pas changé et, si Sixtine n'était pas pressée ou même troublée par sa présence - peut-être qu'elle aurait trouvé sa maladresse amusante. Seulement voilà, cela faisait quatre ans maintenant qu'ils étaient séparés et... pas de la meilleure manière. Alors non, la Ryder avait ravalé son sourire et en avait rajouté une couche derrière pour qu'il rince bien son éponge plutôt que de juste la balancer dans l'évier.

― Quoi ? qu'elle s'était cependant exclamée, assise sur un pouffe dans l'entrée entrain d'enfiler ses rangers en cuir. Hors de question d'aller au boulot en se pavanant en talons - un jour elle s'était retrouvée à enjamber deux cadavres dehors... pas une tâche à faire en escarpins. Et tu peux pas y aller tout seul ? avait-elle soupiré, zyeutant l'heure sur son portable. Les hôpitaux étaient sûrement déjà pleins à craquer... Avec le temps, les gens blessés avaient pris l'habitude de risquer de sortir une heure plus tôt pour s'y pointer (dans l'espoir qu'un fou furieux ne les y attende pas bien entendu). Ils vont mettre une plombe avant de t'prendre en charge, ta blessure n'a pas l'air prioritaire. qu'elle avait commenté, la gorge nouée. Il ne pouvait pas rester ainsi mais... La prochaine fois tu restes chez toi. Ca évitera... tout ça. Avale ton truc, on y va. Maintenant. Autoritaire. Toujours. Encore plus depuis.

-- LA VEILLE
― Autrefois ouais, navrée d'te décevoir mais ce n'est plus le cas. qu'elle avait répondu avec un léger craquement dans sa voix - trahissant le véritable fond de sa pensée. J'fais c'que j'veux! Au moins s'il m'arrive un truc, j'mourrais la conscience tranquille. Et si la personne était réellement inoffensive et bienveillante ?! Non... Inconcevable pour Sixtine de laisser quiconque en détresse dehors. La preuve avec lui. Sûrement le dernier à mériter l'asile et pourtant... Tu pouvais m'appeler j'sais pas ? Ca aurait sûrement été plus rapide que de se pointer dans le coin.
Mais peu importe. La Ryder s'était levée et avait décidé de fuir... Parce que son estomac ? Y'avait un drôle de mélange qui s'y passait. Des papillons aux ailes enrobées d'acide. Ca piquait, chatouillait et la torturait à petit feu.

― Tu supposes bien. Pas question d'lui faire une place dans son lit (vu ce qu'il y a fait dedans la dernière fois, lol.) J'laisse la porte de ma chambre ouverte. Parce que là aussi, y'avait des choses qui n'avaient pas changé... Comme sa peur d'être enfermée et sa peur de l'obscurité la plus complète. Difficiles premières nuits sans sa compagnie. Ca faisait quatre ans mais Six, elle en chiait toujours autant pour trouver le sommeil sans lui. Sans son odeur. Sans sa présence.

Oscar a toujours été un gamin culotté, lui qui part du principe qu'il ne peut obtenir que s'il demande -souvent avec la force-, pour Sixtine c'est son charme légendaire et sa persuasion qui lui a toujours -ou presque- permis d'arriver à ses fins. La belle qui risque d'être moins coopérante à ce stade de leurs relation, il en a bien conscience. j'vais mettre dix ans à chopper un taxi, plus les heures interminables que j'vais passer là bas. qu'il finit par dire après sa remarque, sachant pertinemment qu'elle a raison, sa blessure n'a rien de prioritaire en comparaison à tous les types qui doivent déjà se trouver sur place. La mine penaude, le regard brillant pour tenter de l'amadouer, il la regarde en avalant sa tasse d'une traite avant de la déposer dans l'évier.  merci. qu'il dit simplement, un grand sourire sur les lèvres, comme un gosse à qui on a promis un gâteau. Il ne réagit pas sur l'fait qu'il ferait mieux de rester chez lui l'année prochaine, promesse qu'il ne saura pas tenir de toutes façons, alors ça ne sert à rien de se voiler la face ou mentir. Il traine un peu la patte mais sort juste après elle, la jambe qui provoque une douleur atroce mais le spectacle qui vient se jouer devant ses yeux à l'instant où elle déverrouille l'entrée est bien pire.  voilà pourquoi j'serais quand même là l'année prochaine. qu'il lâche froidement. Les corps inertes qui jonchent le sol, il s'en fout pas mal mais si c'était elle, il en deviendrait fou.

-- LA VEILLE

 Il pousse un large soupire avant de dire dans un murmure. ouais, mais moi j'm'en remettrais pas. sans vraiment savoir si elle l'a entendu. C'est un fait, la vie sans Sixtine Ryder pour fouler le monde de ces baskets n'aurait aucun sens. Il a beau faire semblant, agir comme si c'était OK d'être sans elle chaque jour, c'est pas l'cas. Et si elle ne veut jamais le pardonner très bien, mais il a besoin d'savoir qu'elle est quelque part sur cette terre et qu'elle respire, c'est comme ça. parce que tu m'aurais répondu peut être ? qu'il rétorque, un brin sarcastique. Lui qui avait les premiers temps tenté de la joindre une bonne centaine de fois avant de comprendre qu'il ne gagnerait ce petit jeu qu'en attendant que son tour vienne, elle avait les cartes en main et tant qu'elle ne souhaitait pas reprendre la partie, il n'y pouvait pas grand chose. Elle s'est redressée pour se rendre jusqu'à sa chambre, laissant cette porte ouverte à trop de possibilités pour qu'il trouve le sommeil. Il tente de s'installer mais fini par se raviser et trainer son corps juste à l'entrée de la chambre pour demander :  t'es sure qu'il y aurait pas une petite place pour moi ? taquine t-il d'un grand sourire.  j'peux avoir un oreiller au moins ? il se mordille la lèvre et fixe son regard.

Personne n'était réellement préparé à voir les rues de son chez soi recouvertes de sang et de corps. Personne n'était assez solide pour ne pas flancher face à un tel tableau. Sixtine ? Elle en ravalait des sanglots à chaque fois. Parce que ça lui foutait la trouille. Parce qu'elle ne pouvait pas s'arrêter à côté de chacun d'entre eux pour s'assurer qu'ils soient bien morts ou non. Peut-être qu'à la place d'agent immobilière, elle aurait été dans le domaine médicale... d'aide à la personne ou qu'importe pourvu qu'elle puisse tendre la main à ceux dans le besoin. Mais avec l'arrivée de la purge en 2014 ? Plus totalement sûre de vouloir occuper une place dans ce milieu là. Les appels à l'agence étaient déjà assez glaçants comme ça... À lui en foutre des frissons dans le dos à chaque fois.

― Tu peux t'en prendre qu'à toi même, j'étais en sécurité. Reconnaissante qu'il se soit déplacé pour s'en assurer ? Ca avait un côté touchant mais, la Ryder ne pouvait pas se laisser attendrir aussi facilement. Elle n'était plus responsable de quoi que ce soit. C'était un grand garçon. Ses choix. Ses conséquences. C'est le dernier service que je te rends. avait-elle tranché alors que, l'avenir allait lui prouver le contraire avec son foutu zippo oublié chez elle. Le zippo que son frère lui avait offert. Son frère décédé lors d'une purge. Pas question. Ou alors tu arrives avant le début... qu'elle se serait permise de dire si l'angoisse de rentrer rapidement dans sa voiture n'était pas prioritaire dans sa tête. C'était peut-être terminé mais, y'avait toujours cette crainte que des malades décident de ne pas respecter les règles. Envoies un message quand tu sors. qu'elle lui avait tout de même ordonné de faire avant de le déposer devant l'immense hôpital où ils avaient bouchonné pendant bien une demie heure. Traffic déjà saturé en temps normal... Pire à une heure pareille.

-- LA VEILLE
Elle ne l'avait pas entendu, ses yeux s'étaient juste levés parce qu'elle avait horreur lorsqu'il pouvait parler dans sa barbe. Est-ce que c'était si difficile que ça d'avoir une bonne élocution ? Argh, saleté.

― Non. Il marquait un point. Toutefois, pour quelles raisons est-ce qu'elle accepterait de décrocher ? Elle... ne lui devait rien.

Il l'emmerdait le Donovan. Cette nuit morbide n'aurait jamais du se passer de cette manière. Elle aurait dû être seule Sixtine. Seule ou avec Jinx. Ou Riley. Ou n'importe qui mais pas lui. Foutue flamme rallumée en un claquement de doigts... Il était fort Oscar. Trop pour qu'elle parvienne à lui résister. C'était d'ailleurs pour cette raison que la Ryder s'était barrée dans sa chambre. Pour ne plus le voir. Pour ne plus l'entendre. Mais elle avait laissé la porte ouverte... Encore. Et elle n'aurait pas dû. Parce qu'évidemment qu'Oscar allait en profiter pour se glisser jusqu'ici. Jusqu'à l'endroit où il avait tout brisé. Pièce qu'elle avait longuement hésité à refaire complètement... Pas dans ses moyens. Matelas déjà trop cher à remplacer. Enfoiré.

― Sûre à 200% ! qu'elle s'était agacée après s'être redressée en sursaut. Elle avait secrètement espéré qu'il vienne. En toute franchise. Mais entre se l'imaginer dans sa tête et qu'il le fasse pour de vrai... y'avait un monde. Là, elle avait juste pris peur. Tu soules. La blonde lui avait balancé son précieux oreiller en pleine poire et de toutes ses forces. Si t'essayes quoi que ce soit pendant la nuit, j'te broie les couilles, et t'inquiètes pas qu'j'sais très bien où elles se trouvent, ça fait p'tet 4 ans mais j'ai pas oublié. qu'on avait aussi pu l'entendre débiter juste après. Oui, Sixtine toujours aussi enragée.